Le Suaire de Turin est depuis 1983 propriété du Pape. C'est le dernier roi d'Italie, Humbert, qui lui en a fait don. Auparavant, et depuis 1452, le Suaire appartenait à la famille de Savoie.
Depuis 1578, il était à Turin, où les Ducs de Savoie ont transféré leur capitale en 1562. Auparavant, la capitale était Chambéry. En 1578, Charles Borromée - déclaré Saint depuis -, évêque de Milan, promet un pélerinage à pied au Saint Suaire si la ville est délivrée de la peste. Le duc Emmanuel Philibert, malgré les résistance des habitants de Chambéry, transporte le Suaire à Turin pour raccourcir la route de St Charles Borromée. Il y restera. En 1997, le Saint Suaire est sauvé d'un incendie qui ravage la cathédrale de Turin.
En 1532, le Saint Suaire avait déjà subi l'épreuve de l'incendie, à Chambéry, dans la Sainte Chapelle où il était déposé. Il fut arraché au feu alors que le coffre d'argent qui le renfermait commençait à fondre. Le linge était alors plié en 48 épaisseurs, et fut brûlé à certains endroits. Là où le tissu était troué, les Clarisses, en 1534, cousurent des pièces d'aspect plus ou moins triangulaires (en blanc sur les photos positives, en noir sur les négatives).
Les Ducs de Savoie avaient reçu le Suaire d'une veuve, Marguerite de Charny, en 1452. Presque cent ans auparavant, en 1356, Jeanne de Vergy, veuve de Geoffroi Ier de Charny, donnait la relique à l'Eglise collégiale (ayant un collège de chanoines) de Lirey, collégiale fondée par son mari en 1353.
Le Saint Suaire, dit alors de Lirey, était vénéré par de nombreux pélerins. Antoine Legrand a retrouvé au musée de Cluny un souvenir en plomb, daté de l'époque par les armoiries Charny-Vergy, sur lequel est figuré le Saint Suaire (les deux corps tête-bêche).
D'où venait le Saint Suaire auparavant? Il est vraisemblable qu'il aurait été rapporté de Constantinople par des croisés. Il est vrai que Constantinople a été prise par les croisés en 1204, et largement pillée. On cite une lettre datée de 1205, par Théodore Ange Comnène au Pape Innocent III, pour se plaindre des pillages des croisés "... aux Français ce qu'il y avait de plus sacré...: le Linceul où fut enveloppé après sa mort et avant sa résurrection Notre Seigneur Jésus Christ. Nous savons que ces choses sacrées sont conservées à Venise, en France, et autres pays des pillards, le sacré Linceul étant à Athènes..."
Othon de la Roche, duc d'Athènes, aurait exposé dans cette ville le Saint Suaire. Les Français sont chassés d'Athènes et le Saint Suaire serait revenu en France directement ou indirectement. Plusieurs hypothèses plausibles sont faites (voir, par exemple, Raffard de Brienne, Cherpillod et Mouraviev).
Avant 1204, de nombreux textes relatifs au Saint Suaire existent.
La localisation d'un Suaire, considéré comme le Linceul du Christ, est assurée à Constantinople depuis 1080.
Ian Wilson a proposé d'identifier le Suaire avec la célèbre image d'Edesse, appelée "mandylion". Il s'agissait d'un linge reproduisant le visage du Christ et conservé à Edesse. Le linge aurait été plié, selon Wilson, de manière à ne laisser voir que le visage; à l'époque, tout ce qui était cadavre était considéré comme impur, et l'on aurait masqué les deux images du corps.
Il faut ajouter la tradition, recueillie par Eusèbe de Césarée, selon laquelle le portrait du Christ aurait été envoyé à Abgar, roi d'Edesse au Ier siècle, qui se convertit.
Il y a une tradition qui remonte bien au Ier siècle (cautionée par la légende du voile de Véronique: celle-ci aurait donné un linge pour rafraîchir le visage du Christ pendant la montée au Calvaire, et le visage du Christ se serait imprimé sur le linge.
Que vaut cette tradition ? certainement ce que vaut le Suaire de Turin: les traditions peuvent expliquer les pérégrinations du Suaire, s'il est bien du Ier siècle, mais elles ne peuvent, seules, prouver l'ancienneté de la relique.